Papa Léguas

"Tudo o que se refere ao homem é dotado de contingência"... Vidal de La Blache (geógrafo)

2.6.05

O editorial de 1/06/2005 do Libération

"Le non du 29 mai ressemble une fois encore à un manifeste pour que le monde se fige, pour freiner à tout prix le déchaînement des forces qui bousculent irrésistiblement le monde. Il y a une tentation du repli protecteur dans le vote du 29 mai, pour tenter d'échapper à une insécurité sociale, urbaine, mondiale.

C'est ce qui rend difficile à avaler le rejet de ce traité un compromis difficile mais qui avait le mérite de créer un système de décision à vingt-cinq, de fournir une boîte à outils collectifs pour réguler les bouleversements mondiaux , c'est qu'il donnait des armes pour contrebalancer l'ultralibéralisme, pour réguler le marché, pour socialiser l'Europe. Tout ce dont on vient brutalement de se priver. Et ce sont les mêmes électeurs qui réclament des armes contre le tout-libéral, et qui viennent pourtant de détruire ce qui leur était proposé. C'est leur droit, mais ce faisant ils viennent de nous désarmer.

Il y a deux autres illusions fatales à la France. D'abord, l'idée que la France pèse encore d'un poids si considérable que l'Europe va naturellement offrir aux Français un nouveau texte. Nos concitoyens oublient que nous sommes 450 millions d'Européens, dont vingt-quatre autres pays qui ne dépendent pas de nous, qui ont leur mot à dire. Il ne se trouvera personne pour vouloir renégocier et il faut redouter comme inévitable que l'Europe d'aujourd'hui, l'Europe réelle, décide de renoncer à un projet trop ambitieux, cette idée que les Français avaient réussi à imposer à tous et dont ils ne veulent plus.

L'autre illusion : le traité a été rejeté parce que l'Europe paraissait être le fourrier du libéralisme. Bingo : les partisans du non ont gagné, non seulement la partie III du traité qu'ils contestaient mais qui va s'appliquer, le calamiteux traité de Nice qui empêche à peu près toute décision européenne, mais aussi le triomphe de Tony Blair et de sa conception très libérale de l'Europe, autrement dit plus de libéralisme et moins de régulation. C'est triste à pleurer.

Comme dans les illusions perdues, plus dure sera la chute. Pour les Français, pour les Français de gauche en particulier."

Serge July